Le Bal des Tartuffes

Ce n’est pas mon meilleur article, loin de là. Avec du recul, il y a beaucoup de points que je reformulerais aujourd’hui de manière différente. Néanmoins, il reste pertinent. Au moment de sa publication, certains n’avaient pas apprécié la dureté de mes propos. Ils se sont reconnus et comme bien souvent dans ces cas-là, ce n’est pas avec la raison, mais bien avec l’émotion qu’ils ont cherché à défendre leur crise identitaire. Certains, comme l’un des personnages qui inspirent cet article, sont allés jusqu’à m’insulter tellement ils se sont sentis touchés dans leur chair.

J’ai toujours pointé du doigt la médiocrité qui règne dans ce que l’on considère comme étant le « woke twitter », mais plus généralement le milieu militant français. Des panafricains afrocentristes qui ne jurent que par l’Égypte aux afroféministes dont l’imaginaire est dominé par les États-Unis, cet écosystème est à l’image d’une communauté dont les bases sont aussi solides que les jambes de Djibril Cissé un soir de Coupe du Monde. Tout le monde en prend pour son grade et à raison. Presque deux ans après la publication de cet article, je ne peux que constater que l’histoire m’a donné raison en vue des récents événements.

Les réseaux sociaux ne seront jamais un lieu propice au débat d’idées. Je ne suis pas naïf, ce ne sont pas des gens qui vivent pour les retweets qui auront à cœur de maintenir une quelconque honnêteté intellectuelle. Cependant, je ne peux me contenir quand je vois ceux que je considère comme étant des fraudes se complaire dans l’hypocrisie la plus totale, et cela, à la vue de tous. Dans mon article initial, il y a un point que j’abordais, la superficialité des combats de nos soi-disant leaders d’opinions. Lorsqu’ils se retrouvent dos au mur, confrontés à leurs contradictions, leurs principes ne sont plus que des accessoires dont on se débarrasse avec autant de facilité qu’un préservatif usagé.

Je n’aime pas le discours qui consiste à excuser la haine de soi en raison de l’âge. Ce n’est pas que l’âge ne peut être l’une des causes de l’ignorance, mais plutôt que ce discours n’a aucune valeur tant il est utilisé de manière aléatoire. Soit nous sommes tous jugés aux mêmes standards, soit il existe des aliénations qui seraient plus excusables en raison du genre, du faciès ou de quelconque autre élément qui servirait la personne confrontée aux mots qui prenaient place dans son vocabulaire blessant. Il n’y a pas de réelle remise en question. Il n’y a que les apparences qui comptent. Comme dit ici : « Quand le militantisme n’existe que pour se donner un genre, les mots ont-ils réellement un sens ? »

Ce réseau fonctionne par affinité. Ce n’est pas nouveau ni même étonnant. Cela devient un problème quand ces « amitiés » ont un impact sur la manière dont nous abordons les conflits intracommunautaires sur une plate-forme aussi large et significative que Twitter. Le concept de « performative wokeness » est très utile pour comprendre ce qui est en jeu ici. Originaire des États-Unis, c’est non sans ironie qu’il décrit très bien l’attitude de ces gens pour qui l’activisme n’est qu’un tremplin vers le statut d’influenceur.

Depuis l’avènement du mouvement Black Lives Matter aux États-Unis, son influence à travers le monde et en particulier en France est indéniable. Les récents événements l’ont prouvé, encore une fois. Ici, je rappelais le manque d’engagement des « wokes » quand il s’agissait des hommes noirs décédés des mains de la police française. Presque deux ans plus tard, il a fallu le retentissement mondial de la mort de George Floyd pour qu’enfin des masses noires se mobilisent pour réclamer justice pour Adama ailleurs que par le biais d’un simple hashtag.

Tous ces gens que je qualifierais ici de « bandeurs des States » ne sont que dans le mimétisme. Ils reproduisent bêtement ce qu’ils observent dans leurs timelines et se gargarisent d’une « conscientisation » bas de gamme faite à coup de threads et à la limite de blog wordpress. Véritables représentants de l’activisme cool, ces gens se partagent la part du lion dans un environnement globalement médiocre composé de noirs, dont eux, en crise identitaire et pour qui la notion de « soi » échappe à toute considération profonde.

C’est ainsi que nous nous retrouvons avec des Tartuffes comme leaders d’opinions. J’ai un mépris que j’assume et que je souhaite voir partagé par le plus grand nombre pour les « wokes ». Entre nous, il y a des points de convergence idéologique, mais des gens qui sont aussi éloignés de la nature même de leur identité n’auront jamais mon respect ni même ma considération. Ils ne sont que les idiots utiles d’un Occident qui a fait d’une jeunesse victime (et oui) de l’immigration les porte-parole d’une lutte qui n’a de sens que parce que le continent africain est à ce jour toujours incapable de fournir à ses peuples un niveau de vie décent.

C’est une chose que d’être déraciné, c’en est une autre que de s’approprier une identité qui n’est pas la vôtre, de vous sentir supérieur en raison de cela et de dénoncer avec hypocrisie des comportements qui furent les vôtres il n’y a pas si longtemps que ça. « Nègre de maison », « Négrochoco », « Oncle Tom » sont autant d’insultes balancées à tout-va par des gens qui considèrent qu’il est impardonnable d’avoir tenu des propos insultants envers sa communauté, et cela, quel que soit l’âge. Que se passe-t-il quand l’un des leurs se retrouve lui aussi dans la « sauce », car il a tenu de tels propos ? Voilà ce qu’il se passe.

Voyez-vous, il se trouve que tout le monde ne passe pas à la guillotine. Il y aurait des Noirs exceptionnels dont la haine de soi ne serait pas si grave et facilement pardonnable, voire inattaquable sous tous les aspects. Quand la psychologie des foules fait effet, le lynchage n’est réservé qu’à certains Nègres. La démagogie règne en maître chez ces gens pour qui l’activisme n’est qu’un élément de plus de l’image qu’ils souhaitent projeter. Ce sont les mêmes qui vous demandent de respirer quand vous les attrapez en pleine tergiversation face à leurs « idéaux ». Les mêmes qui ne parlent jamais d’Afrique.

Je ne donnerais jamais de crédit à ces bouffons et bouffonnes qui rendent une cause juste obsolète quand bon leur semble. Je ne les respecterais jamais, et ceux qui le font ont généralement l’objectif assumé ou caché de se faire accepter par eux, parce qu’il faut le dire, la préservation du capital social est tout pour ces gens qui ont parfois l’opportunité de voir leurs simulacres d’engagement se transformer en « spectacle » rémunéré. Certains écrivent des livres, lancent des podcasts ou des « black business » en tout genre, cherchant à faire du chiffre sur le dos d’une communauté qu’ils ont dénigrée à coup de « niafou » ou autres colibris.

Ils ne veulent pas le progrès d’une quelconque communauté, mais facilitent leurs propres essors et celui de leurs congénères. Tout le monde n’est pas passé par la phase de haine de soi. Ce n’est pas un passage obligatoire. Ce n’est pas avoir le « syndrome du Nègre au-dessus » que de le dire. Les imbéciles aiment universaliser leurs propres tares quand ils sont confrontés à leur manque d’humilité. Ce ne sont pas des gens comme ça qui peuvent se permettre d’être aujourd’hui des donneurs de leçons.

Que vous soyez chanteur ou apprenti influenceur, la haine de soi n’est jamais acceptable. L’âge n’est pas un argument, que l’on ait un vagin ou un pénis. Lien d’amitié ou pas, il s’agit d’être constant et de comprendre que pour être pris au sérieux, il faut être droit. Le « blédard » que je suis n’est pas dupe. Des gens comme ça, j’en ai connu dès mon retour en France en 2014. Ces personnes ne peuvent convaincre que leurs pairs qui voient en Beyoncé une « Mama Africa ». Pour nous autres qui réfléchissons, ils resteront des bouffons et rien d’autres.

Publié par Yoka Kani

Passionnément congolais

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